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Vos réactions : jean.alexandre2@orange.fr

Mes réponses

 

 

 

 

Femmes remarquables

 

ou quelques héroïnes bibliques

 

   

 

Il est question du parcours de l’une des femmes remarquables

dont on peut trouver la trace dans les récits des Écritures bibliques.

 

On s’en rendra compte, elles n’apparaîtront pas nécessairement

selon l’ordre canonique, et elles ne seront pas toutes célèbres :

mention sera faite d’Ève, bien sûr, mais aussi, entre autres,

d’Abigaïl ou de Lydie.

 

Insistons sur le fait qu’il est utile de lire d’abord le récit biblique

lui-même, tant ce que l’on va lire ici est très largement…

interprété.

 

 

 

 

 

 –oOo–

 

 

Chapitre 18

 

Les Hébreux se tenaient au bord du Jourdain,

pressés de le traverser pour envahir Canaan

sous la conduite de Josué, successeur de Moïse.

De l’autre côté se tenait un verrou,

Jéricho, la ville aux puissantes murailles.

Et dans la ville, une prostituée.

On pourra se reporter au livre de Josué,

aux chapitres 1 à 6.

 

 

le fil rouge

ou rahab la prostituÉe

 

 

Voyez comme les Écritures sont moins bégueules que les Églises ! L’histoire de Tamar l’avait déjà montré. Là, c’est l’histoire d'une prostituée, une vraie. Son nom vient d’ailleurs d’un verbe qui signifie mettre à l'aise, et évoque aussi une place publique... Rahab – en hébreu, Rahav – la bien nommée.

Une prostituée, donc, et qui se comportera jusqu’au bout comme telle, privilégiant ses intérêts à toute autre cause.

On peut imaginer alors que sa demeure est une de ces grandes maisonnées où loge toute une famille accompagnée de ses serviteurs, avec toutes les aises connues de l’époque. Et que l'on se la coule douce lorsque on vient demander les douceurs et les faveurs de la célèbre courtisane ou de ses servantes. On apprendra que le roi lui-même la connaît…

Alors quand les deux Hébreux, envoyés en avance par le grand chef Josué pour espionner le pays que le Seigneur-Dieu a promis à son peuple, entrent dans la ville aux célèbres murailles, se croyant naïvement indétectables, bien sûr qu’ils vont s'installer benoîtement dans le lieu le plus accueillant. Accueillant par nature.

Or tout le monde, alors, a reconnu en eux des Hébreux. De ces gens incontrôlables qui se donnent pour mission de s’emparer, entre autres, de la ville. Des ennemis.

Rahav aussi l’a compris. Et loin de les dénoncer, elle les installe pour la nuit. Plus tard, elle dira ce qu’elle a pensé de la situation. Ce qui l’a décidée. C’est tout simple : elle a compris que l’arrivée de ces deux visiteurs annonçait la venue toute proche et la victoire assurée de leur peuple.

Et elle sait ce que cela signifie pour le sien. Car les arrivants et leur chef ne font pas mystère de leur volonté de s’installer là, à la place des habitants actuels. Et cela veut dire massacre.

 

Parole donnée et tenue

 

Certes, la ville est puissante, elle est, dans tous les sens, une ville forte, pas seulement protégée par ses murailles. Elle commande l’une des entrées possibles qui s’ouvrent sur le pays de Canaan, et cela lui a donné au long des siècles la possibilité de commercer et de s’enrichir avec tous ceux qui passent, venant de l’Orient.

Elle a donc, raisonnablement, les moyens d’écraser cette masse de va-nu-pieds qui arrive de nulle part, ces fanatiques agglutinés autour de chefs soi-disant élus par un dieu inconnu. Un dieu sans terre ni royaume.

Raisonnablement, mais… Mais plus raisonnablement encore, pense Rahav, on a tout lieu d’imaginer en revanche ce que cela peut donner que la violente intrusion de ces gens-là dans la ville. Pillage, viols, incendie, destruction. Carnage.

Alors qui est le plus fort ? C’est une question qui met les dieux en lice. Le dieu étrange des Hébreux ou les dieux habituels du monde sémitique de l’époque, dont le dieu Lune que Jéricho vénère plus particulièrement. Or ceux-ci n’ont pas eu même assez de force pour se défendre des dieux de l’Égypte… que le dieu-seigneur de Moïse a ridiculisés.

Le calcul de Rahav est vite fait, elle n’est pas sentimentale : choisir les dieux du lieu et mourir, ou choisir d’aider les fidèles de ce dieu hors norme et se donner ainsi une chance de sauver sa vie, celle des siens, et son commerce.

Rahav n’est pas non plus une héroïne. Ni une croyante fidèle. Elle sauve son bien, corps et âmes, sans toutefois s’engager avec quiconque. Elle prend cependant un risque : une seule parole de ses hôtes lui suffira pour qu'elle cache, conseille, protège et sauve les deux Hébreux.

Or elle a fait le bon choix, car de tout Jéricho, elle seule et les siens vont sortir vivants et libres de la fournaise.

Cela n’a tenu qu’à ce cordon de fil cramoisi pendu à sa fenêtre, à l’extérieur du mur. Un fil de vie qui s’apparente à ces linteaux rouges de sang, signaux pour le Porteur de la mort au moment de l’Exode hors d’Égypte : ne pas tuer ceux-là !* Le fil de la parole donnée et tenue.

 

* Voir au livre de l’Exode, au chapitre 12, versets 21 à 29.

 

 

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