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Vos réactions : jean.alexandre2@orange.fr
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Semaine "sainte"
Cinq
messages brefs pour un temps sans sacré, la semaine dite sainte...
"Sainte"
comme nous le sommes toutes et tous, nous et nos vies très humaines.
Voici
le premier de ces messages :
Dimanche
dit des Rameaux
Est mon roi celui seul qui va mourir
Car je ne veux
plus de roi.
J’appelle roi, ici,
ce qui commande mon existence et l’amène à faire, non ma volonté propre, non la
volonté, non plus, de faire du bon et du bien, mais celle des puissances
morales, religieuses, culturelles, sociales, politiques, économiques qui mènent
le monde au nom de leur bien propre.
Or quand on dit dans
l’évangile que le fils de Dieu est roi, on se réfère à la puissance qu’il avait
déployée dans la Galilée de sa jeunesse.
C’est ce que
rappelle le jour des Rameaux, où son peuple l’acclame lors de son entrée à
Jérusalem.
Il va cesser
d’être roi.
Il abandonne
cette charge et cette gloire (en hébreu c’est presque le même mot).
Il le fait de son
propre mouvement, c’est de cela qu’il mourra.
Il est désormais
sans pouvoir, les puissants le tueront, applaudis par une foule au désir
esclave.
Seul est vrai roi
le roi qui meurt.
Cela fait de ses
vrais disciples des gens qui ne croient plus.
Ils ne croient
plus à ce qui fait la richesse, la puissance et la gloire, le savoir des
puissances.
Ils n’ont plus de
roi.
C’est comme une
utopie, dans laquelle il n’y aurait plus de seigneurs humains, où l’on ne
serait plus jamais les serviteurs d’un être humain, les sujets d’un système qui
divinise un projet humain en sorte que les humains le servent.
Plus jamais ça, mais la loi seule de la
fraternité.
Voici le deuxième
message :
Jeudi, dit "Jeudi
saint"
C’était à son
dernier banquet, juste avant qu’on l’arrête et qu’on le tue. De ce repas de
fête il a dit : C’est mon sang, c’est ma chair.
Le vin bu en
commun créait le sentiment de la fraternité, comme une vie qui circulerait des
uns aux autres.
De même le pain.
Ils avaient faim, loin d’être repus. Faim de pain et d’amitié. S’ils étaient
ensemble, c’était pour manger.
S’ils mangeaient,
c’était pour être ensemble.
Et celui qui
parle va mourir. Car le livre d’évangile est né d’une souffrance. Hommes
heureux fermez-le. Hommes de joie, fermez-la.
Jamais le Christ ne fut plus heureux qu’en ce soir-là, car les plus grands bonheurs sont au moment menacé.
Quand le sang n’est
pas encore versé.
Or il n’y a pas
de vin qui ne soit sang versé, pas de pain qui ne soit chair rompue. Toute
nourriture a eu pour prix, quelque part, ailleurs souvent, chez d’autres, une
douleur, une peine, une oppression, un servage, une mort – ou beaucoup.
Un sang versé, un
corps rompu.
C’est pourquoi il
a dit, du pain rompu et partagé, qu’il est son corps, de la coupe qu’elle est
son sang : n’est-il pas "fils de l’homme" ?
Oui, l’être
humain que voici, et tout entier ; celui qui toujours souffre le prix du
pain et du vin.
Détruit.
Voici le troisième
message :
Vendredi, dit "Vendredi
saint"
On l’accusait de
se vouloir dieu. C’était pire, il se voulait humain.
"Fils de
l’homme", comme on dit en hébreu, c’est ainsi qu’il s’appelait.
Il ne se voulait
pas roi, comme les autres disaient.
Il ne se voulait
pas Dieu, comme on l’en accusait.
"Fils de
Dieu", oui, comme on le disait alors d’Adam, cette figure légendaire du
genre humain.
Mais lui se
voulait temple... et chacun est un temple, sainteté à préserver, à sauver, à
soigner.
Un être humain, le plus beau de tous ceux-là, celui qui ne veut être ni roi ni dieu, devant prêtres et rois, qu’en fera-t-on sinon le tuer ?
Je le sais bien,
cela embête, ces histoires de mort et de tuerie, de croix sanglante et de clous
dans les mains et les pieds,
et de coup de
lance dans le flanc, et de pietà devant un cadavre, et tout cela...
Mes pauvres loulous,
va... allez donc voir en Syrie ce qui s’y passe.
Ensuite on
parlera de l’humanité.
La vraie, celle
qui n’en peut plus de porter le monde sur ses épaules.
Ce que lui vous montre en vrai, accroché là-haut.
Voici le quatrième
message :
Samedi, que j’appelle noir
Sur la croix, il n’avait pas dit "Pourquoi m’as-tu
abandonné ?" ; à la suite du psaume, il avait dit "À
quoi ?", c’est ce qui est écrit.
"Pourquoi", il le savait, c’était tout l’enjeu de
son parcours.
Démuni en bout de course de tout pouvoir et savoir divins.
Oui, de tout savoir aussi.
Mais à quoi l’avais-tu abandonné...?
À quoi est-on abandonné quand plus personne n’est là pour
dire bonsoir ?
Avant ce moment, il vivait. Après, en ce dimanche du
troisième jour où, nous dit-on, on l’avait réveillé, il vivait.
Mais il y a eu un jour où le Christ était mort.
L’être humain.
Il était mort.
Nul évangile sans cela, qui est notre destin.
Abandonnés à l’absence, abandonnés tout court. Morts. Sans
savoir.
Où la question de ton savoir ne se pose pas car tu n’existes
pas. Il n’y a.
Où tu comprends que c’est maintenant que tu vis. Ou non.
En être humain. Ou non.
En salopard ou en beauté, en justesse ou en saleté, en
élégance...
C’est maintenant, en ce samedi.
Voici le cinquième
message :
Dimanche, Pâques
Sans cette mort il n’est pas d’évangile. Sans ce mort.
Pas ce désir, invraisemblablement opérant, de dépasser cet
enfermement.
Car ce jour-là, Dieu dit Non.
Le grand Désir vivant, le Désir créateur, le Désir qui vit
avant, qui vit après, qui vit pendant, qui vit dehors, qui vit dedans.
Le Désir qui est l’autre nom de l’au-delà et de l’en-deçà du
monde et de nous.
Dit Non.
Une porte est ouverte, le monde n’est pas fini, l’univers
n’est pas clos.
Ni l’existence.
Imaginez une existence avec une porte ouverte à
l’intérieur...
Vous êtes à l’entrée, juste au seuil.
Imaginez l’aventure inouïe d’une vie autre, la passionnante
aventure de la découverte des ailleurs.
Imaginez le pouvoir d’un Désir tout-puissant.
– Je fais du neuf, dit Dieu, honte à tous ces limitateurs à
la noix, tous ces prêtres du petit jour, du petit plaisir, du petit bonheur, je
vais plus loin.
Et tu vas plus loin.
Tu es plus que ça.
Sors-toi donc de cette saleté de tombe !
Je dis oui à l’aventure, je dis oui à la bonté, je dis oui à
la beauté, je dis oui à la justesse et à l’élégance de la vie, je dis oui au
combat !
Ah oui, le combat.
La résurrection, combat des justes contre la mort vécue des vies humaines.
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